Translate

samedi 12 mars 2011

Notre débat commence alors que ceux des autres finissent


Le débat sur l’islam du 5 avril prochain n’a pas encore commencé que nous en sommes déjà à compter les coups.

Face à l’ampleur des polémiques suscitées par la question, face aux condamnations plus fermes les unes que les autres, et parce que cette idée est lancée au moment précis où les musulmans du monde entier, mais pas qu’eux, relèvent la tête grâce aux révolutions tunisiennes et égyptiennes, il a fallu réajuster le tir. On a donc glissé d’un débat sur l’islam à une discussion sur la laïcité.

Intitulé différent, fond identique et
amalgame nauséabond.

Explication d’une nouvelle association subversive et indirecte de concept.

Au départ donc il est question de débattre de la place de l’Islam en France, étant entendu qu’on sait déjà que le Président souhaite que ces discussions aboutissent à un Islam de France. Et tant pis s’il faut pour cela en dénaturer la substance même. Nul n’étant prophète en son pays, c’est donc les parlementaires UMP qui procéderont à la rédaction d’un manuel du bon musulman de France.

Phase deux, ça dérape. Mariani explique que ce débat est normal car l’islam est la seule religion à poser problème, Copé veut des prêches en français, Marine Le Pen est donnée en tête dans tous les sondages au premier tour de l’élection présidentielle, notre diplomatie est à la peine dans les pays arabes, anciens et nouveaux. Il convient de réajuster le tir, et de débat sur l’islam en France, on évolue à débat sur la laïcité. Le thème restant le même, l’islam.

Une adaptation rhétorique me direz vous. Pas vraiment.

Phase trois, celle qui induit la stigmatisation, la pratique de l’islam est antinomique de la laïcité.

La boucle est bouclée. Ainsi lorsqu’on débat de l’islam en France, on débat en réalité de la laïcité. Comprenez donc que la religion musulmane telle qu’elle est conçue par ses textes fondateurs ne peut pas cohabiter avec une société laïque. Il convient alors de modifier le culte musulman. Beau signal, au passage, envoyé au monde arabe en pleine révolution ; si vous voulez continuer à pratiques l’islam, oubliez la laïcité, restez des pays musulman, ou modifiez vos pratiques religieuses.

Et nous voilà avec un nouveau concept, inventé directement pour les besoins de la cause, la pratique d’un Islam laïque. Les propositions vont pleuvoir. On sait déjà que l’islam laïque c’est un islam en français, sous contrôle, et il est même question d’ouvrir des écoles de formations, des mosquées sans minaret, des prières sans rues, des hallals sans restaurant, et j'en passe et des meilleurs.

Alors, je suis absolument navré de décevoir tous les tenants d’un islam nécessairement radical, par essence extrémiste, mais cette religion peut parfaitement se marier à une société laïque, approfondissez la question, étudiez en les textes. Evitez les poncifs, les idées reçues, les traductions à l’emporte pièce, replacez ces écrits dans leurs contextes de l’époque, n’omettez pas d’intégrer qu’il y a un milliards trois cent millions de musulmans dans le monde, et vous ne pourrez qu’en déduire que c’est une religion de tolérance s’il en est.

Pour s’en convaincre il eut fallu ne pas donner toutes ces latitudes à ceux qui en véhiculent une idée déformée, excessive, une interprétation violement orientée. Mais la géo politique n’est pas celle d’il y a trente ans, les enjeux géostratégiques  d’antan ne sont pas ceux d’aujourd’hui, nos expectatives iraniennes ne sont plus les mêmes, ben Laden n’est plus un allié. Nos monstres construits sont devenus autonomes. Nous ne contrôlons plus le GIA algérien qui a versé dans la terreur, le Hamas et le Hezbollah sonnent désormais occupés, et les pays adeptes de la Charia politique nous livrent rappelons le l’énergie dont nous avons besoin pour avancer.

Alors oui pour comprendre l’islam, pour débattre de l’islam, il faut outrepasser ces stigmates d’une politique passée bien mal menées, s’attacher à la substantifique moelle des textes,  à ce que pratique le plus grand nombre, et commencer à regarder aux évolutions sociales, politiques et humaines de nos voisins ayant franchi le pas de la révolution, et qui finalement ont déjà dépassé ce débat depuis bien longtemps.

Débattons, mais sachons que les musulmans du monde sont déjà en train de régler le problème, qu’ils ont relevés la tête, qu’ils sont en marche, et que bientôt ils auront fini d’éliminer tous leurs despotes, intégristes ou pas, qui se servent de l’islam ou de l’islamisme pour assoir  leur tyrannie. Car c’est bien ça qui guette ceux qui utilisent et détournent une religion à des fins purement politicienne, disparaître du paysage politique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire