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mercredi 18 décembre 2013

Errance nocturne...


Nous y voilà. Le bistrot est fermé, le dernier client est parti il y a une petite heure. Les chaises sont sur les tables, le balai est passé, le zinc brille de mille feux.

Il est 02h10 et la ville dort. Mais pas toute entière. Les excisés de la vie déambulent dans les rues, dans leurs salons, sur leurs claviers, dans leurs têtes.

Les souffrances rejaillissent, les douleurs s’exacerbent, la nuit révèle la peine des âmes.

Oh je vous vois les bienheureux, lisant ces vers qui n’en sont pas, vous demander « de qui parle-t-il ? »

Mais d’un ami bien sur. Un type qui me fait des confidences.

Un homme en peine d’amour à force d’avoir trop aimé.

Un homme en quête d’absolu bien que tout soit relatif.

Mesdames ce texte est contre vous. Tout contre.

Il est de ceux, cet ami, qui était
votre bon ami. pas le meilleur, celui là est généralement une ancienne passion qu'on entretient. Le Bon ami, vous savez, ce garçon à qui on peut tout dire, parce que c’est un bon ami. Et un bon ami, pour vous mesdames, c’est un garçon sans amour, son coeur se limite à l'amitié.

Le bon ami, celui qui meuble le vide laissé entre deux passions amoureuses, mais à qui on ne donne ni amour ni passion.

Sans jamais être le premier, vous lui demandiez de prendre ce qu’il y a de plus intime en vous les soirs de solitudes, mais en vous gardant bien de lui donner ce qu’il y a de plus précieux. Il n'y avait ni la passion de l'inconnu, ni la candescence de la séduction.

Parfois, plus tard, plus loin, certaines se sont aventurées à lui dire je t’aime mais sans jamais le faire.

Vous preniez ses caresses pour de la tendresse, ses ébats pour de la technique, ses silences pour de l’acquiescement, ses passions pour un rôle.

Vous êtes passées à coté sans entendre cette passion dévorante qui se soulevait sous vos pas légers, comme vos sentiments.

Vous dissertiez avec vos amies, avec vos amants, avec vos amours inavoués sur ce qu’il était, ce qu’il n’était pas, ce qu’il voulait être. vous meubliez vos fins de soirée sur son cas, ca vous rapprochait de votre cible. Paroxysme de l'amour, il vous permettait une complicité avec celui qui occupait sa place.Vous jugiez, tranchiez l’Etre d’un homme que vous n’avez jamais écouté car il n’a jamais parlé.

Il a perdu tous ses combats contre vos prétendants pour ne pas les avoir menés.  Et ceux là, manipulateurs des cavernes faisaient les paons, vous baudruches des casernes vous tombiez sous le charme, car quoi de plus simple que d’éclipser un silence.

Les plus téméraires l’ont pensé jaloux là où il voulait de l’absolu. Vous le jugiez possessif là où il était possédé. Vos amants futurs et anciens, souvent les mêmes, trop heureux de la flatterie, vous expliquaient avec la plus grande innocence du chasseur, ne pas comprendre cette défiance. En veillant bien à l’alimenter. Le jeu de la complicité amicale, la flagornerie de l’affection fraternelle, pour mieux masquer une entreprise de séduction à fin de destruction. 

Il n’y a pas de victoires en amour, il n’y a que des défaites.

Et vous donniez conférence sur ce qu’il y a de plus intime chez lui, ce que vous pensiez ses faiblesses, ses peines, ses tourments. Vous vous ouvriez à vos courtisans de ce que lui-même ne s’est pas ouvert à vous. Vous l’offriez en pâture à ceux là, tapis dans l’ombre de la rivalité.

Et vous lui demandiez surprise, ensuite, pourquoi ses silences, vous lui reprochiez sa froideur d’âme, alors que vous la dégustiez la veille entre la poire et le dessert avec un vautour du bonheur.

Vous preniez sa souffrance pour de la basse rancune, ses blessures pour de la simple bouderie.

Vous lui avez expliqué tant de fois tout ce que vous aviez fait par amour, parce que vous trouviez ça beau. Sans imaginer qu’il voulait, lui aussi, ce beau là. Vous contiez, rieuse, vos naïvetés amoureuses, des étincelles dans les yeux, l’air rêveuse, de ce temps béni où vous aimiez avec passion. Où vous donniez tout. Ce temps révolu.

Vous contiez l’abondance à un homme en disette.

A cet homme là, vous avez tout dit. Vous l’avez vu sans exigence, vous le croyiez sans besoin.

Il ne disait rien, et vous pensiez qu’il ne voyait rien. Il ne partait pas, et vous pensiez qu’il était toujours présent.

Et un jour vous ne le trouviez plus sans vous rendre compte que c’est vous qui n’avez jamais été là. Lui n’avait pas bougé, aimant silencieux, amant discret, passionné transi.

Vous pensiez lui avoir offert beaucoup. A bien y regarder vous avez pris tout ce dont vous aviez besoin. Vous ne lui donniez jamais ce à quoi il tenait, mais vous lui présentiez en offrande ce qu’il vous partageait.

Vous aviez prie l’habitude qu’il vous cajole, en ignorant sa solitude que personne ne consolait. Puis vous demandiez qu’il vous cajole, en ignorant que sa solitude le préoccupait. Enfin vous vous plaigniez qu’il ne vous cajole plus, en ignorant qu’il s’en était allé dans sa solitude.

Vous refusiez en public de lui dire je t’aime lorsqu’il revenait chargé de la lune. On ne prend jamais de gant avec celui qui pense fort.

Mais je suis certain d’une chose. Au moment de vous rendre, quand le plaisir est à son paroxysme, quand vos ongles enfoncés dans sa chair il plantait ses yeux dans les votre, à cet instant là, à ce moment là, il était le seul qui comptait, il avait envahi votre corps et votre coeur. Mais seulement pendant ce moment là. Ce court instant de déraison.

Oui, cet ami, me compta ses états au bistrot, et comme le bistrot a une âme, je me suis dit qu’il serait bon de conjuguer les deux. 

Lui se reconnaîtra, Elle, je ne sais pas. Et puis existe t-elle vraiment ? Pour lui je veux dire. Car pour les autres, elle existât bel et bien. La preuve, elle en aime encore chacun un peu.

3 commentaires:

  1. je crois que je suis amoureuse ;-)

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    1. relisez. vous vous trompez. ce n'est pas quelque chose qu'on croit. l'amour est une évidence et non une croyance

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  2. c'est la conscience de l'amour qui fait défaut et non l'amour lui même, elle l'aime mais ne le sait pas encore.
    Que de gens sont passés les uns à côtés des autres, à côté de leurs bonheurs à cause de leurs consciences d'amour qui ne se sont pas croisées

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